HAUTE COUTURE : LA MAISON SARA CHRAÏBI A DÉFILÉ À LA PARIS FASHION WEEK

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Le 26 janvier, la Maison Sara Chraïbi défilait à Paris, dans le calendrier officiel de la Haute Couture. Une grande première et une reconnaissance internationale pour la designer marocaine, qui y présentait sa collection “L’étoffe des songes”. Elle nous raconte.

À la rédac’, on se souvient comme si c’était hier du défilé de Nourredine Amir en 2018 à l’invitation de la Chambre Syndicale de la Haute Couture. Cinq ans plus tard, c’est la créatrice Sara Chraïbi qui a eu l’honneur de rejoindre le calendrier officiel de la manifestation parisienne. Les 25 silhouettes de la collection “L’étoffe des songes” ont été dévoilées au Théâtre du Châtelet. Robes à franges, capes XXL, corsages brodés, plastrons de perles, pantalons de velours… Les pièces tantôt fluides, tantôt sculpturales, faisaient la part belle au quadrillage et à la “géométrie savante” des arts islamiques. Shoelifer s’est entretenu avec elle après son défilé.


Qui vous a invitée à intégrer le calendrier officiel de la Haute Couture ?

J’ai simplement rempli un formulaire en ligne qui me faisait rêver depuis des années. C’est une rencontre avec Pascal Morand (le président de la Fédération de la haute couture et de la mode) qui m’a décidée à postuler. J’ai pris mon courage à deux mains et je suis allée chercher un parrainage. Sidney Toledano (PDG de LVMH Fashion Group) a accepté de me parrainer. Tout est allé très vite ensuite.

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Quelle a été votre réaction quand vous l’avez appris ?

J’ai sauté de joie. Et puis j’ai eu peur. Le timing était très serré : j’ai appris fin décembre que j’étais retenue pour un défilé qui aurait lieu fin janvier !

Qu’est-ce qui a été le plus challengeant pour vous ?

Le temps, qui était très court justement. J’ai eu seulement un mois et demi de préparation. Et puis aussi le fait de présenter mon travail à des gens qui ne le connaissent pas. C’est difficile de s’adresser à un public qui n’est pas encore conquis. Il m’a fallu développer un discours clair et intelligible.


La dernière fois que nous nous sommes parlées, vous veniez de sortir votre collection de caftans “Songe initiatique”. Sur le podium de la Fashion Week parisienne, vous avez présenté “L’étoffe des songes”. La thématique onirique est récurrente…

En effet, j’ai pensé cette nouvelle collection comme un prolongement de mon travail antérieur. J’ai gardé le même propos et l’essentiel des techniques. Cette fois-ci, il est question d’”étoffe” car je voulais faire référence au tissage. J’ai utilisé différentes techniques de tissage dans mes créations. Mais je vois aussi la collection comme un tissage de plusieurs fragments de mon identité.


En parlant d’identité, avez-vous fait défiler des mannequins marocaines ?

Oui, tout à fait. Nous avons choisi des filles au teint brun, plutôt typées arabes et africaines. L’idée était de sublimer des beautés qui sont encore trop souvent critiquées ou stigmatisées.


Et qu’avez-vous mis en place au niveau scénographique ?

Pour moi, la haute couture s’inscrit dans un temps long. J’ai donc demandé aux mannequins de marcher très lentement. Je voulais qu’on puisse vraiment découvrir le vêtement à son passage sur le podium. D’ailleurs le défilé a débuté sur une musique au luth de Saïd Chraïbi, mon oncle, aux inspirations très gnaouies et avec laquelle j’ai grandi. Puis a succédé le morceau “Les moulins de mon cœur” de Frida Boccara. Je voulais vraiment qu’il y ait une dualité dans la musique, qui fasse référence à ma double culture. Je pense que cet effet de lenteur a apporté une certaine touche de douceur et de mélancolie au défilé. C’était un moment suspendu.

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Dans votre nouvelle collection, il y a beaucoup de blanc, de noir, de bleu marine. Des touches d’or aussi. Et soudain, cette silhouette rouge. Pourquoi ?

Pour tout vous dire, c’est la première pièce que j’ai conçue. Cette robe rouge, je l’ai pensée comme une véritable ponctuation au milieu de la collection. Il y en a une autre dans le défilé, qui est cette silhouette de mannequin aux cheveux longs jusqu’au sol. Avec cette chevelure, je voulais questionner la notion de parure, parler de la liberté de se découvrir mais aussi de se couvrir. Et bien sûr, cela renvoie à un certain type de beauté arabe.


Quelles ont été vos inspirations pour cette collection ?

Je suis restée fidèle à mon ADN en présentant des allures orientales contemporaines. J’ai aussi utilisé des textiles et des savoir-faire marocains, mais en les réinterprétant librement. J’ai créé de nombreux tissages pour “L’étoffe des songes”, mais aussi beaucoup de franges de soie, qui me rappellent les cheveux des femmes. Je voulais créer des silhouettes en mouvement, et qu’on ne parvienne pas à distinguer la limite entre le textile et l’ornement. Il y a aussi tout un travail sur le cordon et sur l’entrelacement des fils et des textures.


Comment voyez-vous la suite pour la Maison Sara Chraïbi ?

J’espère pouvoir faire défiler ma prochaine collection à la prochaine Fashion Week de Paris qui se tiendra début juillet.

Photo (c) : Maison Sara Chraibi

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