POUR SHOELIFER, LE NEZ ANNE FLIPO DÉCRYPTE LIBRE, LE DERNIER PARFUM D’YVES SAINT LAURENT

Le spot publicitaire du dernier parfum Yves Saint Laurent, Libre, ne vous a sûrement pas échappé. C’est Dua Lipa qui l’illustre, sur les fameuses paroles des Rolling Stones “I’m free, to do what I want, any old time”. Le lancement de cette nouvelle fragrance s’est fait (après Paris) à Marrakech, ville si chère au créateur, en la présence d’Anne Flipo, le nez qui a conçu Libre. Récit d’une escapade sous le signe de la liberté avec, en bonus, l’interview d’Anne Flipo.

Coucher de soleil dans le désert d’Agafay, près de Marrakech. Le décor est planté pour raconter l’histoire de Libre et fêter le lancement du dernier parfum Yves Saint Laurent, sous le ciel étoilé, souligné à l’horizon par la silhouette des montagnes de l’Atlas. Autant dire que l’événement était très “Saint Laurent”. Car la volonté de la maison est d’opérer un retour vers la ville rouge, si chère à son fondateur et inscrite aujourd’hui dans l’ADN de Saint Laurent Paris comme d’Yves Saint Laurent Beauté.

C’est ce qui rend ce lancement si particulier. L’hommage à Marrakech, d’abord, mais aussi le nom du jus, Libre. Car c’est ainsi que le créateur souhaitait que les femmes vivent. Alors, comment évoque-t-on la liberté dans un parfum ? Pourquoi la fleur d’oranger est un ingrédient à part ? Comment s’inscrit-elle dans ce sillage masculin/ féminin ? Assise dans un salon à ciel ouvert, sous les étoiles, au milieu de nulle part, la créatrice du parfum Anne Flipo nous a expliqué Libre. Si ce n’est pas une définition de la liberté…

 L’odorat a ce pouvoir d’aller réveiller des souvenirs que vos autres sens ont oubliés”

Libre, c’est un mot qui évoque beaucoup de choses. Comment met-on la liberté en bouteille ?

En essayant de sortir des sentiers battus. On se demande comment on pourrait travailler un masculin / féminin. De là, on cherche à faire les choses différemment. J’ai commencé à chercher dans la palette des notes dites “masculines” : les boisées, les fougères, les cuirs. Ensuite je me suis dit: “Tiens, si j’essayais de la détourner et de la déstructurer, de la remasteriser ?” Et c’est cette base qui fait de Libre un super-féminin, addictif dans sa floralité. Avec la fougère qui symbolise la force, la puissance et le sillage pour structurer le jus, puis la fleur d’oranger, qui apporte l’addiction. Je pense que c’est une bonne illustration de la liberté.

La parfumerie YSL a longtemps réinventé ses grands classiques, comment innover dans une telle maison ?

On part d’une idée forte, ce qui était le cas d’Opium ou de Paris, pour ne citer qu’eux, et on garde cette idée jusqu’au bout. Il y a une colonne vertébrale, une technicité à trouver et une résonnance pour des marchés qui sont tous très différents les uns des autres. Il faut que le sillage puisse parler aussi bien à une femme en France, au Maroc, aux Émirats, en Allemagne ou aux États-Unis. Lorsque l’on a la chance de pouvoir travailler sur un projet à cette échelle, il faut lui donner l’ampleur qu’il mérite. C’est une tâche compliquée, c’est pour cette raison qu’il y a eu autant d’essais : plus de 1500.

Marrakech, on le sait, a une place particulière dans l’univers Saint Laurent. Avez-vous, vous aussi, des affinités avec cette ville ?

J’ai eu l’occasion de venir deux ou trois fois à Marrakech mais toujours très rapidement, sans avoir la chance de réellement m’imprégner de son énergie. Aujourd’hui, en revanche, la découvrir en cette occasion, lui donne une dimension particulière.

Qu’évoque-t-elle à votre nez ?

La chaleur, la douceur de l’air, la vie, la terre, les épices, la fleur d’oranger…

Quelle est votre odeur préférée ?

La fleur d’oranger. Cela tombe donc très bien, je baigne dedans depuis mon arrivée. On peut en mettre dans absolument tous les parfums, de la cologne aux bouquets de fleurs blanches en passant par les fougères ou les orientaux. Elle va donner du caractère et de la structure.

L’odeur des souvenirs est-elle importante pour vous ?

Oui, très. Je crois que plus on prend de l’âge, plus c’est important. La richesse de ce que l’on a pu sentir, petit, remonte à toutes occasions. J’ai été élevée à la campagne, où chaque période de l’année était marquée par l’éclosion de fleurs différentes, et j’ai eu la chance d’avoir des grands-mères qui cuisinaient énormément. J’ai donc été éduquée par l’odorat et le goût, qui sont très liés. Comme j’ai peu voyagé, j’ai rencontré les épices assez tard dans ma vie et depuis, je rattrape les découvertes que je n’ai pas pu faire auparavant.

En parlant de souvenirs, pourquoi les parfums ont-ils un tel pouvoir ?

C’est corrélé à un cerveau plus primitif. À une partie plus instinctive. L’odorat a en effet ce pouvoir d’aller réveiller dans votre mémoire des souvenirs que vos autres sens ont oubliés, ou archivés plus loin.

Comment vous est venue cette vocation ? Le désir de devenir “nez” ?

J’ai longtemps cru qu’elle était venue par hasard mais je ne le pense plus. Je suis entrée dans une école qui faisait de la parfumerie mais pas que, je m’étais donc spécialisée dans l’arôme alimentaire, parce que mon père dirigeait une sucrerie. Je pensais alors suivre un peu la même route. Et finalement, il ne s’est rien passé en bouche, mais tout avec le nez. Tout me venait avec facilité lorsqu’il s’agissait de l’odorat. Ensuite l’étape de l’association de ces senteurs –que j’apprenais très vite à reconnaître-, est venue. J’ai persévéré dans cette voie là et depuis, je m’éclate.

Libre d’Yves Saint Laurent
En parfumerie
Prix: 1075 DH

Farah Nadifi

C’est d’abord à une carrière d’avocate que Farah aspire, après avoir eu son bac à Marrakech. Rapidement, néanmoins, sa passion pour la mode la rattrape. Née à Paris où elle vit jusqu’à ses 14 ans, elle baigne dans ce milieu : sa mère fait carrière dans le retail de luxe. Après être passée chez YSL, Salvatore Ferragamo, Giorgio Armani ou encore Miu Miu, elle est approchée pour diriger le premier flagship de luxe à Casablanca : la boutique Fendi. Elle la dirige quatre ans avant de devenir acheteuse pour Gap et Banana Republic. Mais au bout de 10 ans de carrière dans le retail, elle se lance dans une nouvelle aventure en s’essayant à l’écriture. C’est avec Sofia Benbrahim qu’elle collabore d’abord, pour L’Officiel Maroc, puis Shoelifer, en tant que journaliste mode et lifestyle.

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