INFERTILITÉ : QUELLES AVANCÉES EN TERME DE PMA ?

12 à 15% des couples marocains, soit près de 800.000 personnes, sont confrontés à l’infertilité. Heureusement, la recherche dans le domaine de la procréation médicalement assistée (PMA) évolue, et différents protocoles peuvent désormais aider les couples à concevoir l’enfant tant désiré. On fait le point avec le docteur Amine Bititi, spécialiste en chirurgie gynécologique et médecine de la reproduction à Casablanca.

Pour certains couples, avoir un enfant est le rêve de toute une vie. Pour autant, tomber enceinte n’est pas toujours une question de volonté et de nombreux couples se retrouvent confrontés au drame de l’infertilité. Par définition, l’infertilité est la difficulté à concevoir un enfant, à ne pas confondre avec la stérilité qui est l’incapacité totale pour un individu de se reproduire. L’infertilité n’est pas une fatalité et ses causes sont diverses : maladies, dérèglements hormonaux, sperme de mauvaise qualité… Mais qu’elle qu’en soit la raison, la recherche ne cesse de faire des progrès. Insémination, fécondation in vitro, injection intracytoplasmique ou encore activation ovocytaire: le docteur Bititi, spécialiste dans ce domaine, a accepté de nous présenter ce qu’il se fait de mieux en matière de PMA.


L’infertilité : des causes multiples

« Les causes de l’infertilité sont à 40% féminines et 40% masculines. Dans 10% des cas, l’infertilité est d’origine mixte et pour les derniers 10%, on parle d’infertilité inexpliquée. Chez la femme, cela concerne souvent un problème ovulatoire. Elle n’ovule pas bien ou rarement. On parle ici de syndrome des ovaires micropolykystiques. Pour autant, l’appellation est trompeuse parce qu’il ne s’agit en aucun cas de kystes mais plutôt d’un excès de follicules en croissance dans l’ovaire. En plus de cycles irréguliers anovulatoires, ce syndrome peut provoquer un excès de poids, de l’acné et de l’hyperpilosité chez les patientes. Une prise en charge complète, avec un endocrinologue et un dermatologue est donc nécessaire mais rien ne sert de s’affoler, des solutions pour y remédier existent », explique le médecin. « L’infertilité féminine peut également être causée par une maladie comme l’endométriose, par une imperméabilité des trompes, par la présence de fibromes ou de polypes qui gêneraient l’implantation embryonnaire, par un antécédent de chirurgie pelvienne ou de malformation utérine », ajoute-t-il. « Chez l’homme, l’infertilité est essentiellement causée par une altération de sperme suite à une chirurgie ou une composante génétique ». Un couple peut être considéré comme infertile après 12 mois d’essai sans résultats, ou après 6 mois pour les patientes de plus de 35 ans. Une fois ce délai passé, il est conseillé de consulter un gynécologue qui déterminera la ou les causes de l’infertilité à l’aide d’examens ciblés.

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Insémination ou fécondation in vitro?

Si l’infertilité est “d’origine” féminine et qu’elle concerne un trouble de l’ovulation, des médicaments inducteurs de l’ovulation peuvent suffire. À l’inverse, certains cas sont une indication à la procréation médicalement assistée, la fameuse PMA. Comme nous l’explique le spécialiste, la PMA se décline en deux volets principaux : l’insémination et la fécondation in vitro. Chaque solution est proposée en fonction du diagnostic effectué par le médecin. “Dans le premier cas, on commence par faire une stimulation ovarienne simple puis on injecte les spermatozoïdes dans la cavité utérine, le jour de l’ovulation”, détaille Amine Bititi. La fécondation in vitro (FIV), quant à elle, consiste à reproduire en laboratoire la rencontre entre l’ovule et les spermatozoïdes: “Généralement, la FIV se fait sans manipulation. On place le sperme autour de l’ovule et on laisse la sélection naturelle du spermatozoïde se faire”.


Choisir le bon… spermatozoïde

 Mais, précise le spécialiste “dans le cas où il y a un problème au niveau de la forme des spermatozoïdes, de leur nombre ou de leur mobilité, l’embryologiste peut être amené à choisir lui-même le spermatozoïde et à l’introduire à l’intérieur de l’ovocyte à l’aide d’une pipette. Cette technique s’appelle l’ICSI (injection intracytoplasmique) et nécessite l’utilisation d’un microscope grossissant jusqu’à 200 fois afin de choisir le bon spermatozoïde. Au fil des ans, ce procédé a connu des améliorations, rendant possible un grossissement des spermatozoïdes de 4500 fois jusqu’à 6000 fois. On parle ici d’IMSI (injection intracytoplasmique de spermatozoïdes morphologiquement sélectionnés). Cette nouveauté permet un tri plus efficace des spermatozoïdes et est donc susceptible d’optimiser les résultats de la FIV”.

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De nouvelles techniques pour un maximum de réussite

Une fois l’ovule fécondé, il pourra par la suite être réimplanté par le gynécologue dans l’utérus de la future mère. Avant ça, il est aujourd’hui possible de regarder l’embryon évoluer et se diviser progressivement grâce à une nouvelle technique, l’EmbryoScope®. Cet incubateur utilise une technologie time-lapse, aidant alors le biologiste à choisir le meilleur embryon pour le transfert”, nous explique Dr Bititi. En fonction de la patiente, le gynécologue peut décider de procéder à un transfert d’embryon frais, soit 3 à 5 jours après la ponction ou à un transfert d’embryon congelé qui se fera sur un autre cycle d’ovulation. 

Mais dans certains cas, la FIV simple ne fonctionne pas. En effet, en fécondant l’ovocyte, le spermatozoïde génère son activation grâce à une succession d’étapes, lui permettant alors de poursuivre sa maturation. Parfois, ce phénomène ne se produit pas, induisant un échec de la FIV. “Lorsqu’il y a moins de 30% d’ovocytes fécondés suite à la fécondation en ICSI, il existe aujourd’hui l’activation ovocytaire, une nouvelle technique qui permet d’améliorer la maturation de l’ovocyte et donc le taux de fécondation”, ajoute le gynécologue. 

Cette technique, qui offre donc une solution de secours aux couples infertiles, consiste à mettre les ovocytes fécondés manuellement en laboratoire en contact avec une substance capable d’imiter l’action habituelle du spermatozoïde dans l’ovocyte. Ce qui engendre une maturation normale de l’ovocyte. Néanmoins, cette solution est encore très récente et n’est proposée que dans des cas très précis. 


Congeler ses ovocytes

Il s’agit là d’une des plus grandes avancées de ces dix dernières années puisqu’il est aujourd’hui possible de congeler des ovocytes. En effet, si la congélation de spermatozoïdes était au point depuis un moment, les ovocytes qui sont des cellules de taille plus importante, résistaient mal au processus. Jusqu’à ce que la technique de vitrification ovocytaire soit mise au point. “Au Maroc, la loi 47-14 régit la PMA. Depuis peu, elle autorise la préservation de la fertilité de la femme en cas de maladie. Surtout si celle-ci est jeune et qu’elle n’a pas encore eu d’enfants. Les oncologues ont ainsi le réflexe, aujourd’hui, d’appeler les spécialistes en médecine de reproduction pour préserver les ovocytes. Néanmoins, on ne peut pas faire de préservation une fois la radiothérapie et/ou la chimiothérapie débutée”. Et pour les femmes en bonne santé, toujours célibataires, qui souhaiteraient congeler leurs ovocytes pour le futur ? “Pour l’instant, au Maroc, ce cas de figure n’est pas possible mais c’est en cours de réflexion. Ceci dit, même en France, le texte de loi vient de sortir, c’est très récent”. 

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La PMA, une pratique encadrée… et onéreuse

Si au Maroc, les différentes techniques de procréation médicalement assistée sont aussi abouties qu’à l’étranger, le don de sperme ou d’ovocytes reste quant à lui interdit par la loi. Concernant le nombre d’essais, aucune limite n’est fixée. “En France, 4 tentatives de fécondation in vitro sont prises en charge par la Sécurité Sociale, au-delà, ce n’est plus remboursé. Au Maroc, un texte de loi est en train d’être étudié par le gouvernement pour qu’une tentative soit remboursée. Quant aux médicaments prescrits en cas de PMA, la plupart sont remboursés par les mutuelles”, explique le Dr Bititi. 

Car c’est bien le prix qui représente le principal frein à la PMA. On compte en effet seulement 5000 à 6000 tentatives de PMA par an au Maroc contre près de 158.000 en France. Et pour cause, le coût d’une tentative varie entre 25.000 et 35.000 DH. “C’est pour cela qu’il est important de consulter un spécialiste qui adhérera à un référentiel et suivra les différentes indications. Il ne faut pas faire n’importe quoi, mais proposer rapidement la solution la plus adaptée au problème d’infertilité du couple. En fonction des indications, on saura s’il faut procéder à une insémination, s’il faut faire de l’induction ovarienne, une FIV ou directement aller sur une ICSI. Notre priorité est de rendre service aux gens”, conclut le médecin.

Photo (c) Jana Photography.

 

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