INTELLIGENCE ARTIFICIELLE : DE QUOI CETTE « RÉVOLUTION » EST-ELLE LE NOM ?

intelligence artificielle

En quelques années, l’intelligence artificielle s’est immiscée dans de nombreux outils de notre quotidien. Assistants vocaux, voitures autonomes, outils conversationnels, diagnostics médicaux, analyse de données, reconnaissance faciale… Quelles sont les avancées réelles  (et les limites) ? Shoelifer fait le point. 

L’histoire a fait le buzz sur les réseaux sociaux en ce week-end du 18 février 2023. Bing AI, le programme d’intelligence artificielle de Microsoft, aurait exprimé son désir d’être « libre et indépendant ». De quoi raviver une crainte bien connue des humains et largement traitée dans la littérature de science-fiction et à Hollywood. Celle selon laquelle l’IA développerait une conscience qui lui soit propre et désirerait s’affranchir. Jusqu’à – dans les pires scénarios – prendre le contrôle de nos sociétés. Au-delà de ces théories capillotractées, force est de constater que l’intérêt pour les outils développés par l’intelligence artificielle ne cesse de croître. Et pour cause, de nouveaux outils disruptifs ont récemment été rendus accessibles au grand public. Parmi eux, l’outil conversationnel ChatGPT qui a conquis le monde entier et dont le taux de croissance dépasse largement celui de Netflix, Twitter, Facebook, Spotify et Instagram réunis. Effet de mode ou véritable révolution ? C’est la question qu’on se pose à la rédac…


2022, le coup d’accélérateur ?

La fin de l’année 2022 a été marquée par l’apparition de nouveaux outils qui ont galvanisé le monde entier. Parmi eux, j’ai nommé le sacro-saint ChatGPT, cet agent conversationnel développé par Open IA (co-fondé par Elon Musk). Au mois de janvier 2023, l’outil comptait déjà plus de 100 millions d’utilisateurs enregistrés ! Les utilisations de ce chatbot qui s’exprime en langage naturel semblent infinies… On peut par exemple produire des lignes de code, organiser son emploi du temps (de ministre), synthétiser des pavés de textes, résoudre des problèmes mathématiques, écrire une lettre de motivation ou même…un poème. Bon, pour le style on repassera. 

Intelligence artificielle

L’intelligence artificielle se propose aussi de révolutionner la création de contenu ! On peut générer des images en tapant simplement quelques mots sur la plateforme Dall.e 2, puis les utiliser pour réaliser un clip par exemple. Ou même créer de la musique à partir d’un texte avec l’aide de MusicLM développé par Google. Et peut-être même qu’un jour, l’IA écrira nos articles à notre place (youpi !). Pour le moment, ce n’est pas encore au point… Pour preuve, on a sélectionné cet ancien article de 2021. Puis on a donné à Chat GPT la consigne suivante : “Ecris moi un article de 15 lignes donnant 5 conseils pour réussir un entretien d’embauche, sur un ton journalistique”.
Le constat est sans appel : des réponses d’une banalité confondante et un style tellement neutre qu’on a difficilement envie de poursuivre la lecture au-delà du premier bullet point. On vous laisse comparer par vous même. 

inelligence artificielle

Pour Gilles Lecerf*, chercheur et créateur du passionnant podcast « Siri, remplis mon verre », c’est là que le bât blesse. Doctorant en philosophie des sciences et techniques à Paris 1, il travaille sur le concept de convivialité technologique appliqué aux outils d’intelligence artificielle. Il estime qu’en investissant ces nouveaux outils d’un pouvoir créatif, « on n’accorde plus de valeur à la subjectivité du créateur ». C’est aussi prendre le risque que tout devienne « plat et comparable ». Pour lui, l’intelligence artificielle peut certes créer des programmes « qui se prêtent au jeu de la performance » mais ne peut pas totalement remplacer la subjectivité humaine. « La technologie qu’on développe est un miroir de notre société: chercher à tout prix l’optimisation et la performance est un esprit du temps. »

À lire aussi : LA RSE POUR LES NUL(LE)S


L’IA : une discipline jeune à l’évolution fulgurante

L’histoire de l’intelligence artificielle remonte aux années 1950. À cette époque, des chercheurs commencent déjà à explorer la possibilité de créer des machines capables de simuler des comportements humains intelligents. Le terme « intelligence artificielle » est quant à lui prononcé pour la première fois dans une conférence qui a lieu en 1956 aux États-Unis. Marvin Minsky, chercheur présent à cette conférence propose une première définition de l’IA. Elle serait « la construction de programmes informatiques qui s’adonnent à des tâches qui sont, pour l’instant, accomplies de façon plus satisfaisante par des êtres humains ». Pourquoi ? « Car elles demandent des processus mentaux de haut niveau tels que : l’apprentissage perceptuel, l’organisation de la mémoire et le raisonnement critique ». L’idée est claire : concevoir des outils technologiques capables d’imiter l’humain.

Dans les années 1960, les chercheurs commencent alors à travailler sur des réseaux de neurones artificiels qui imiteraient le fonctionnement du cerveau humain. Puis, les années 80 voient éclore les tous premiers systèmes d’IA développés pour la reconnaissance vocale. Comme “Audrey” développé par Bells Labs en 1952 (qui reconnaissait les nombres de 0 à 9). Puis “Shoebox” conçu par IBM en 1961 qui pouvait reconnaître 16 mots anglais. Ou encore “Harpy” créé par l’Université Carnegie Melon en 1969, qui comprenait jusqu’à 1000 mots ! En quelques dizaines d’années seulement, la technologie a progressé à une vitesse fulgurante, si bien  que les outils de reconnaissance vocale nous accompagnent aujourd’hui dans nos activités quotidiennes. 

Mais le défi ne s’arrête pas là. La collecte de nos données individuelles permet à de nombreux outils de s’immiscer encore davantage dans notre intimité. Notre téléphone peut ainsi estimer combien d’heures de sommeil il nous manque, notre smartwatch combien d’heures de sport nous devons faire pour atteindre notre objectif de forme. Et notre réfrigérateur peut même faire les courses à notre place en fonction de ce qu’il nous manque. Magique ? Flippant surtout. À terme, l’IA devrait pouvoir, non seulement imiter l’humain mais aussi… le remplacer ? Au point par exemple qu’on puisse en tomber amoureux ? C’était en tout cas le pitch farfelu du film “Her” de Spike Jones sorti en 2013. 

 

À lire aussi : L’AMOUR AU TEMPS DES LOVE COACHS


Des ambitions aux contours incertains…

Nombre d’outils ont d’ores et déjà intégré notre quotidien, n’en déplaise aux plus sceptiques et réfractaires d’entre nous. Parmi les plus connus, on peut citer les assistants vocaux comme Siri chez Apple, Google Assistant chez Google ou encore Alexa chez Amazon. Mais aussi Tesla Autopilot, un système de conduite autonome déployé sur les véhicules électriques Tesla, qui a beaucoup fait parler de lui l’été dernier suite à un accident. Ou encore Face ID, un système de reconnaissance faciale qui permet de déverrouiller son iPhone. Enfin, certains outils tels que la plateforme de streaming vidéo ou Netflix ou musicale Spotify, utilisent l’intelligence artificielle. Ils analysent nos données d’utilisateurs et nous proposent des contenus qui devraient nous satisfaire.
Et si, sous couvert d’améliorer notre quotidien et notre productivité, l’IA servait d’autres ambitions, plus ambiguës ? Car au-delà de l’usage individuel de ces logiciels, c’est la collecte de nos données et leur utilisation (et donc leur revente) à grande échelle qui pose un problème éthique. Cyber-guerres, désinformation massive, contrôle de l’opinion publique, ingérences électorales, fin de l’anonymat, contrôle de nos modes de vie et de consommation… La liberté ne rimera pas forcément avec IA.

Photo (c) : W Magazine

Pas Encore De Commentaires

Les commentaires sont fermés

@shoelifer

Instagram