Il était une fois la mode. Ce monde que l’on adore, qui nous inspire la plupart du temps, nous surprend parfois, comme avec ce nouveau phénomène d’“uglification”. Des looks farfelus arpentent les podiums et les silhouettes de nos créateurs préférés arborent des accessoires plus-moches-tu-meurs : chez Gucci, les mannequins se baladent carrément avec leur tête coupée sous le bras. L’univers de la mode ne tournerait-il plus rond ? Pourquoi les créateurs se la jouent provoc’ alors que tout ce qu’on demande, nous, c’est que la mode nous fasse sourire, telle une licorne multicolore et fluorescente ? Avant de nous réfugier dans le placard de notre mère à la recherche de pièces vintage, on décrypte pour vous la petite histoire d’une grande tendance.
Par Widad Anoua
La mode et la provoc’, un mariage d’amour
La provoc’ fashion n’est pas apparue au 21e siècle. Quand Coco Chanel ou encore Marlène Dietrich osaient afficher un style androgyne, qui ne choque plus grand monde aujourd’hui, elles osaient alors braver l’incompréhension et les critiques. Et plus on avance dans l’histoire de la mode, plus des courants vestimentaires provocateurs se fraient un chemin sur les podiums et dans les rues. Les looks des hippies, des punks ou encore des premiers rappeurs, avec leurs pantalons trop bas, ont dérangé avant d’être acceptés.
Le pourquoi du comment…
Depuis déjà quelque temps, la tendance générale est d’affirmer que la Mode ne crée plus rien de nouveau, et ce n’est pas si faux. Réinterprétées, mises au goût du jour et agrémentées d’une jolie histoire (l’art du storytelling, si cher aux marketeurs), les tendances ne disparaissent, semble-t-il, que pour mieux revenir. Du coup, les créateurs utilisent leur univers personnel, leurs expériences et leur vécu pour mettre en scène leur vision de la mode et proposer une “rupture” avec ce qui a été créé auparavant. Il s’agit de susciter notre intérêt, puis de nous donner envie d’acheter. Et quoi de mieux, pour cela, que la provoc’ du “good bad taste” ?

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La mode moche, on en fait quoi ?
Maintenant qu’on a compris d’où vient la tendance “ugly”, la question demeure : on en fait quoi ? Si les créateurs se permettent tout, on ne va pas se gêner pour en faire autant. Les conservatrices choisiront de bouder ce courant parce que de toute manière, elles savent ce qui leur va, ce qu’elles aiment, et ne se laissent pas duper par les campagnes de com’. Les plus téméraires –celles qui pensent que la mode est un jeu dont les règles sont faites pour être transgressées–, opteront pour des pièces ludiques qui apportent de la légèreté à leur quotidien. Nul besoin, cependant, d’aller jusqu’à se balader avec votre couette sur le dos, à la Viktor & Rolf. Optez plutôt (au choix) pour un sac cabas façon Tati (Balenciaga) au bureau, un sautoir XXL gold (Gucci) pour pimper votre robe de cocktail, des lunettes kitch (Dolce Gabbana) ou un maillot à l’imprimé “poilu” (Beloved Shirt, été 2018) pour provoquer les voyeurs sur la plage.
Attention, modeuse ou pas, il faut savoir raison garder : votre look aura du mal à se relever d’un outfit agrémenté d’une paire de Crocs, quelle qu’elle soit. Ni la version compensée, ni le modèle stiletto n’auront grâce aux yeux des passants ! Finalement, dans la mode comme dans la vie, on pioche ce qui nous arrange, sans oublier que nos choix ont des conséquences.
