BILLET D’HUMEUR : 40 ANS, LA NOUVELLE VINGTAINE ?

La mèche blanche que j’ai sur le haut de la tête est arrivée un beau matin, à 19 ans. Panique à bord ! Même si mes potes trouvaient ça “trop cool”, j’ai passé 15 ans à la teindre, sans succès. Mes cheveux étant dépigmentés, la couleur ne tenait jamais. À 35 ans, fatiguée de donner l’équivalent du PIB de l’Allemagne à ma coloriste et bien qu’on me surnomme Tornade (le personnage des X-Men), j’ai décidé de la laisser vivre.

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Et là, le monde se divisa en deux, comme la Mer Rouge devant Moïse. D’un côté ceux qui trouvaient ça magnifique (“mais c’est ta signature, j’adooooore !”) ou encore celles qui demandaient à ma coiffeuse de leur faire “la même chose”. De l’autre, les sceptiques, qui ne comprennent toujours pas pourquoi je m’obstine à garder cette mèche annonçant prématurément ma date de péremption.

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Erreur sur la personne ?

Ah bon ? Moi ? Vieillir ? Mais le matin, je regarde encore des dessins animés, je mange des Chocapic au goûter (oui, je prends un goûter) et entre un Woody Allen et un Marvel au ciné, je fonce vers les supers héros sans hésiter. Il y a forcément erreur sur la personne !

Et un matin, Facebook s’en mêle. Au réveil, alors que je check rapidement mon téléphone, devant mon chocolat chaud, s’affiche un souvenir “le même jour, il y a 5 ans”… La claque est monumentale. Facebook doit se tromper de profil : je ne sais pas qui est cette personne. La photo qui “orne” actuellement mon mur semble être un “remix” de ce portrait, sur lequel on aurait utilisé le filtre vieillesse de l’appli Face App.

Bref, la sentence est sans appel. La vérité sort autant de la bouche des enfants que des algorithmes Facebook. Ces saloperies vous démontrent au quotidien que vous n’êtes plus la même personne qu’avant-hier. Ainsi soit-il.

L’aveu

Il faut être honnête, il y a bien eu quelques signes avant que le réseau social ne rende son verdict. D’abord, le test du crayon. Quel test ? Il est très simple, vous savez si votre poitrine est en forme si, lorsque vous glissez un crayon en dessous… il tombe. Désormais, ce satané crayon tient.

Ensuite, lorsque l’on n’a pas l’entraînement sportif de Serena Williams, on réalise qu’accepter un match de tennis la veille pour le lendemain est une très mauvaise idée. Il faut désormais s’y préparer mentalement et physiquement 15 bons jours à l’avance, et s’affamer les 48h précédant le match comme pour être sûre de rentrer dans sa robe de mariée. Ça, c’est uniquement si on veut réussir à faire semblant d’avoir un minimum de dextérité. Au lendemain du match, lorsque l’on se réveille et que notre corps entier n’est qu’une immense courbature, on se jure –comme après une cuite– que “plus jamais”.

La collectionnite

D’ailleurs, parlons-en, des cuites. À 39 ans et demi, pourquoi un apéro se transforme-t-il systématiquement en coma éthylique ? Pourquoi me faut-il une semaine de sommeil pour espérer chasser le pivert qui cogne à l’intérieur de mon crâne ? Avant, jamais on n’entendait, en trinquant, “Attends, il faut boire beaucoup d’eau si on ne veut pas galérer demain matin”. L’eau ? Mais à une époque, l’eau ne nous servait pratiquement qu’à nous laver ! Pourtant, on accumule les lendemains de fête où l’on n’est plus que l’ombre de l’épave du Titanic, avec les muscles qui hurlent d’avoir dansé une demi-heure.

Je n’accumule pas que ça, pour être honnête. On devient un peu collectionneur avec l’âge. De petits anges en porcelaine ? Oui, mais je ne parle pas de ça. On collectionne les kilos qui ne se perdent plus en 3 jours de détox, les ex-maris, les regrets, les points de fidélité au resto où l’on déjeune le midi, les rides, les fringues dans lesquelles on espère rentrer à nouveau un jour, le maquillage pour camoufler ces cernes que l’on ne saurait voir… et j’en passe.
Et vous savez quoi ? C’est génial !

La réponse

Car la vingtaine, c’était une période très cool, mais survendue. Un peu comme ces hôtels club all inclusive que l’on voit les dimanches soirs dans Zone Interdite : quand on arrive, il n’y a ni piscine, ni cours d’Ashtanga comme prévu.
La trentaine elle, était traitre. On nous a pourtant rabâché que “35 ans c’est l’âge d’oooooor” de la femme. Du plaqué or plutôt. On s’accomplit professionnellement, personnellement, on entre dans le club des femmes à la charge mentale saturée mais on est au max parce qu’on assure sur tous les fronts. Bref, “les calculs sont pas –encore– bons Kévin”.
Puis, un matin, on a 39 ans et demi et la définition du luxe tient en un seul mot : l’énergie. Et notre patience, qui a 39 ans et demi aussi, elle en manque, d’énergie. Comme le dit si bien Meryl Streep, “ce n’est pas une question d’arrogance » mais juste de force qui manque et a fortiori de choix qui s’imposent.

Alors tout devient plus clair, on se trouve particulièrement belle dans le miroir. Certes, on ne sort pas de Koh-Lanta sans séquelles. Mais justement, c’est le jeu, et se regarder en se disant ”Ouais au final j’me kiffe”, c’est le gagner. On sait aussi de qui on a envie d’être entouré pour continuer la partie (parfois même pour la finir). On sait à quelle nourriture on est intolérant. Et à quel genre d’êtres humains aussi. On sait.

On sait surtout que l’on n’a pas fini de prendre les murs, et que tout ira bien quand même. On sait que l’amour dure trois ans, que les peines de cœur passent (de plus en plus vite), et que l’on va commencer à perdre des êtres chers. On sait.

Alors à la question de Florence Foresti “40 ans : alors vieille ou pas vieille ?”, je répondrais que… j’ai pas le temps, Bob l’Éponge commence dans 5 minutes.

Farah Nadifi

C’est d’abord à une carrière d’avocate que Farah aspire, après avoir eu son bac à Marrakech. Rapidement, néanmoins, sa passion pour la mode la rattrape. Née à Paris où elle vit jusqu’à ses 14 ans, elle baigne dans ce milieu : sa mère fait carrière dans le retail de luxe. Après être passée chez YSL, Salvatore Ferragamo, Giorgio Armani ou encore Miu Miu, elle est approchée pour diriger le premier flagship de luxe à Casablanca : la boutique Fendi. Elle la dirige quatre ans avant de devenir acheteuse pour Gap et Banana Republic. Mais au bout de 10 ans de carrière dans le retail, elle se lance dans une nouvelle aventure en s’essayant à l’écriture. C’est avec Sofia Benbrahim qu’elle collabore d’abord, pour L’Officiel Maroc, puis Shoelifer, en tant que journaliste mode et lifestyle.

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